• Deuil

    Inmortales mortales si foret fas flere,
    flerent divae Camenae

    DeuilDidier Motchane est mort hier.  Pour rendre hommage à ce personnage immense de l'histoire du mouvement ouvrier et socialiste français, qui a su rester un exemple de lucidité, de cohérence intellectuelle, d'honneur et de loyauté, et bien plus encore,  dans tant de combats souvent douteux, dont le résultat à ce jour n'est certes pas satisfaisant, et dont je suis fier d'avoir été l'ami, il faudrait écrire des pages et des pages. J'espère essayer un jour de le faire.

    En attendant ce jour, je peux toujours utiliser ce qui vaut tout ce que j'écrirai jamais: ses nombreux textes, malheureusement très dispersés, hors les trois livres qu'il a publiés. En voici un presque inédit, la retranscription de la conférence qu'il avait donnée à ma demande sur le sujet Que reste-il du socialisme, telle qu'elle avait été publiée dans notre revue confidentielle d'alors. L'idée était de moi, qui étais déjà soucieux de rouvrir certains vieux placards, ce à quoi Didier était alors, pour de justes raisons bureaucratiques, fort réticent. La merveilleuse gentillesse qui ajoutait à toutes ses qualités l'avait conduit à accepter, et le résultat m'avait prouvé combien j'vais eu raison d'insister (Apparemment, il n'y a pas eu de photos de cette conférence. Je faisais le pingouin à la tribune, et il faut croire que je n'avais trouvé personne pour tenir l'appareil dans notre mouvement de masse. Vous avez donc celle du congrès de Nantes).

    Une de des formules de Didier que je préfère, dont j'ai souvent assommé ceux, s'il en était, qui avaient la bonté de me lire, est "Il y a des sursauts de vertu qui se perdent. Que le glissement du temps engloutisse ses couards et ses couacs, et l'on sera tout étonné qu'il soit possible d'entendre à nouveau ce que parler veut dire". Il écrivait cela en décembre 85 ou janvier 86. Trente ans plus tard, le glissement et l'engloutissement restent à venir. Ils viendront, mais Didier ne sera plus là. Jusqu'à hier, nous avions néanmoins un moyen simple et pratique d'entendre ce que parler voulait dire: l'écouter. Ce moyen nous manquera désormais. Il nous reste encore celui de le lire.

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